L'Algerino

Les Derniers seront les premiers

(361 Records)

Dès l'introduction, « L ' Algerino », , indique la couleur de l'album : sincérité, humanité et vérité coûte que coûte. Peu importe le cynisme abject de notre époque, peu importe le politiquement correct qui dicte actuellement sa loi, « L'Algerino », Samir dans le civil, Marseillais qui a grandi entre les tours de béton , là ou le quotidien n'est jamais facile, là ou la lutte n'est pas qu'illusion, sort son premier album, « Les derniers seront les premiers », l'arme à l'œil, les poings serrés, ou la poésie du bitume pactise avec force et volonté, conviction et foi. Il y a un son et un esprit Ici , le rap se redécouvre. Stagnant depuis quelque temps dans un surplace parfois étouffant, il a besoin de nouveaux souffles, de nouveaux porteurs d'étendard, loin des clichés, loin des boucles fatiguées, qui tournent dans le vide. « L'Algerino » appartient, sans le moindre doute, à cette catégorie. Il rappe le cœur ouvert, les yeux droits devants, fixant l'avenir, préférant se frotter à l'incertitude plutôt que de se taire ou d'attendre, il fuit la facilité, sans concession, apte à remplir les piste de danse, pour preuve, le premier single « On est là », fédérateur et animé d'un groove diabolique, comme d'éveiller les consciences.

Ou sur « Est-ce Que Tu M'as Vu » deuxième single imparable de cette album, où il remonte dans son passé, ou il chante la fierté bien placée, le combat d'une existence, ou ne se cherche aucune excuse, « Est-ce que tu m'a vu révolté du système, quand j'allume la télé, personne me ressemble, au parlement personne me représente, quant on parle de mes semblables, c'est que des braqueur on ferme les yeux quand ils sont professeurs » et ou il se livre, souvent touchant : « Est-ce que tu m'a vu p'tit gars timide, tchatcheur fébrile, qui tremble quant une fille le regarde… » assumant ses faiblesses.

L'Algerino regarde son monde, un journaliste urbain qui veut faire bouger les conscience, il s'essaye au témoignage, ne refuse aucune confrontation, aucune douleur, et se veut toujours tourné vers l'après. Se plaindre, pas question. Pointer du doigt les errances d'un monde moderne en pleine perdition, des raccourcis médiatiques systématiques (un barbu, un poseur de bombes…..) aux destins des plus démunis, il chante le présent, servi par un flow motivé, entre sourires en coin, émotions à fleur de peau et cris de révolte. Un nouveau souffle, oui. Celui qui, à onze ans, dégainait ses premières rimes sur scène, et qui pensait encore à tracer jusqu'au diplôme d'ingénieur ou de prof de maths, a finalement choisi la musique, après des études scientifiques. Toutes les musiques…….

Ses morceaux savent mêler les ambiances et se moquent du modèle académique, il passe d'un beat pur et dur à des croisements funky, electro et même rock ; des constructions qui aiment installer des ambiances, une approche visuelle proche du 7ème art, où les sons suggèrent autant d'images que de mots. Pas étonnant de le retrouver signé chez 361 Records, géographiquement et moralement, L'algerino fait preuve de cohérence. Le grand frére Akhenaton lui a fait confiance en lui laissant diriger cet album. En l'emmenant en premier partie de la tournée IAM. Là, il a pu apprendre, observer, sa passion pour la musique y a indéniablement gagné en cohésion. Ses certitudes et ses visions pouvaient alors sans risque s'exprimer sur ce disque qui dégage une générosité rarement entendue, loin des mythomanes pseudo « bad boyz » qui se dégagent du rap français actuellement.

Ce disque si personnel, si politique, devrait interpeller du monde et faire bouger les consciences. Et montrer la voie à suivre pour les prochaines années. Parce que l ' Algerino ne fait pas semblant, parce qu'il pense haut et fort. Avec « Etoile D'un Jour » , aux cotés de Soprano ou « En Force » , Samir raconte le monde. Enfin. « Il parait que le rap, c'est le chant des arabes et des blacks, je suis citoyen du monde et je rappe aussi pour mon frère white...." (« Levez le voile sur vos pensées ») ou "Parce qu'on préfère la guerre à la paix, les armes aux dialogue, je suis mort d'un cancer de la haine généralisée… », (« Les derniers seront les premiers »), une prose qui vibre, ou qui brûle, et où l'histoire tient sa place, de l'Irak à Sabbra et Chatilla , de l'Afghanistan à New York, du quotidien des quartiers pauvres aux couloirs du pouvoir ou l'on écrit le futur des hommes sans la moindre humanité, une prose qui a conscience de son impact, et qui donc réfléchit avant de larguer ses bombes. Une démarche consciencieuse qui devrait servir d'exemple.

Bref vous l'aurez compris, j'ai kiffé cette album, et j'attend le prochain avec impatience.

Ben pour L'Ingrédient

Vous trouverez sur ce disque:

1. Honneur et bravoure
2. Est-ce que tu m'as vu?
3. On est là
4. On revient de loin
5. Les dernières seront les premiers
6. Sans retenue aucune
7. Le rêve francais
8. J'dénonce
9. Témoin muet
10. Etoile d'un jour
11. Dans le mouv'
12. En force
13. 21
14. M.A.R.S
15. Levez le voile sur vos pensées
16. T'sais c'est qui, qui cause?
17. Envoie l'son
18. La patience est une arme

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L'Ingrédient - Le.Mag.Indé.Des.Indés - 2003/2005